Variations autours des ténèbres en 3 actes
Allons y franco, on est en plein mois de Novembre alors autant ne pas faire dans la dentelle et rajouter directement 100 balles sur la table de la déprime.
A cet effet et pour mon plus grand plaisir, j’ai récemment fait l’acquisition pour la bibliothèque Kateb Yacine de 3 disques dont la noirceur poisseuse vous donne envie, au mieux d’aller vous rouler en boule sous la couette, au pire de relire du Cioran en position fœtale.
Donc, dans la famille des grands névrosés de la rentrée je voudrais Nick Cave avec son dernier album « Skeleton tree ». Pour ce superbe opus, Nick a rangé au placard toute velléité hargneuse, punk ou garage. Sa musique est épurée au maximum, laissant la part belle à sa voix sombre, grave, une voix mise à nue, implorante. Et pour cause, si l’on se penche sur l’histoire de cet album, on apprend qu’il fait suite au décès d’un de ses jumeaux, tombé d’une falaise l’année dernière, à l’âge de 15 ans, après avoir pris du LSD.
Une douleur que Nick Cave cherche à affronter au travers de Skeleton Tree afin de trouver une raison d’avancer. Il en résulte une ambiance solennelle, poignante, où malgré l’omniprésence de sa douleur, émane un espoir, une résilience.
On garde le rythme avec l’inquiétant King Dude remonté tout droit des enfers de Seattle. De son vrai nom Thomas Jefferson Cowgill, il a déjà sévit dans plusieurs formations allant du hard core au death metal, avant de (lui aussi), laisser sa rage de côté pour aller flirter avec les gothiques. Il se fait alors connaitre du commun des mortels pour son folk apocalyptique caractérisé par sa voix d’outre-tombe qui n’est pas sans rappeler Johnny Cash à ses dernières heures. Sa musique lancinante est marquée par l’omniprésence de la mort mais aussi de Dieu et toutes ses reliques, comme autant des figures inquiétantes, menaçantes, inquisitrices.
Faut dire que quand on regarde un peu sa bio (ou ce très bon docu de Trax), on voit clairement que ce jeune homme un peu torturé du ciboulot à quelques raisons de parler latin à l’envers : élevé par une mère lui faisant pratiquer la méditation à l’aide de cristaux d’énergies et un père à la limite de porter lui-même les stigmates du christ.
Son dernier album Songs of flesh & blood – In the key of light est un bijou gothique à savourer les soirs de grande déprime.
Et pour clore cette tragédie, voilà le troisième acte de la pièce : Wovenhand.
Groupe de dark country issu de la scène de Denver et conduit par le charismatique David Eugene Edwards, ancien chanteur des 16Horse Power. Lui aussi mue par une ferveur dévorante, parfois à la limite de la transe, souvent inquiétante, jamais feinte. Leur dernier album « Star Treatment » a tout d’un preach enragé, d’une litanie sombre et bouleversée. Un album à l’énergie presque animale et à l’écoute hypnotique. De passage dernièrement à la Belle Electrique, Wovenhand a collé une bonne claque au public Grenoblois réunis en ce soir de pluie pour une messe … noire vous l’aurez compris.
Voilà c’était l’instant solstice d’hiver, déprime et blues pré-Noël. Mais comme disait le grand philosophe Axl Rose « Nothing last forever, even cold November rain ». Ce à quoi aurait pu répondre un autre grand philosophe « taisez vouuuuuuuuuuuuus » !!