UN AMERICAIN A GRENOBLE

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Peut-être connaissez vous Théo Hakola, le musicien américain installé en France depuis la fin des 70’s, fondateur des groupes Orchestre Rouge et Passion Fodder dans les 80’s, personnalité importante de la scène indé de ces années là, et à qui l’on doit entre autres la signature de Noir Désir chez Barclay et la réalisation de leur premier album. Mais ça c’est un temps que les moins de trente (40 ?) ans ne peuvent pas connaître, et on peut dire qu’ensuite, sauf pour ses fans, Théo s’est un peu fait oublier malgré l’enregistrement de cinq albums en solo qu’il a dû autoproduire et autofabriquer, dont le dernier, magnifique, « Drunk Women and Sexual Water » est sorti en 2007. Que dire de sa musique ? Je ne suis pas un spécialiste, mais je dirais qu’il joue avec fougue une sorte de patchwork rock, punk, folk et country, associant parfaitement le violon et la guitare électrique, la tradition et la modernité, et qu’il faisait cela bien avant 16 horsepower ou Calexico qui, eux, ont rencontré un succès bien moins confidentiel. Mais c’est comme ça, et plutôt que pleurer contribuons même modestement à réparer cette injustice en l’invitant au 8ème Printemps du Livre, car notre homme, en plus d’être un bon songwriter oublié, est un grand écrivain américain pas très connu.

Son dernier livre Le sang des âmes (éd. Intervalles 2008) a le souffle épique des meilleurs romans américains. Il parle de l’exil à travers le destin de Pirjo, un petit bout de femme qui a quitté sa Finlande natale à la fin de XIXème siècle et qui doit ressembler comme deux gouttes d’eau à l’arrière grand-mère de Théo Hakola. Cette histoire triste et sublime est encadrée dans le livre par une autre plus anecdotique d’Américains installés à Paris de nos jours, dont l’un est justement l’arrière petit-fils de Pirjo. Le traitement littéraire de ces deux parties est complètement différent, lyrique et ample pour la première, le ton est plus dialogué et ironique pour l’autre, comme pour signifier l’absence d’enjeu des vies contemporaines, le bout de l’histoire atteint. Car entre les deux, et le roman nous l’aura montré, un siècle de guerres, de luttes syndicales et de désillusions est passé. Les rejetons d’aujourd’hui sont les fruits malades et égocentriques de l’individualisme triomphant et de la fin des idéologies. Tandis qu’ils veulent changer de fringues ou de petit(e) ami(e), d’autres avant eux ont voulu changer le monde.

C’est de tous ces sujets et de lui-même, son parcours artistique et militant, dont viendra parler Théo Hakola à la bibliothèque Kateb Yacine le vendredi 19 mars à 18 heures dans le cadre du 8ème Printemps du Livre et vous êtes tous invités à venir en discuter avec lui. Mais je vous mets en garde, il aura sa guitare et comme l’avait écrit Woody Guthrie sur la sienne : « Ma guitare est un fusil qui sert à tuer les fascistes ».


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