HAZMAT MODINE, « Cicada »
Si on m’avait dit que le disque le plus enthousiasmant du moment était un disque de blues !!!
Le blues, ce genre que l’on s’imaginer volontiers poussiéreux, chanté par de vieux noirs exhumés du Delta du Mississipi ressassant les mêmes chansons plaintives depuis le début du siècle (le 20ème), ou bien par quelques guitaristes blafards et nostalgiques enchaînant des grilles d’accords plus ou moins justes sous prétexte que ce qui compte dans cette musique, c’est les tripes qu’on y met…
Voilà un disque qui coupe court à ces a priori : du blues qui tout en ne reniant pas ses racines (en témoigne le « Mocking bird » d’ouverture, évoquant les work-songs pratiqués par les esclaves pour rythmer le travail des champs dans le sud des Etats-Unis), est capable d’intégrer un shamisen japonais, un cymbalum hongrois, un groupe ghanéen (le Gangbé Brass Band), une balalaïka, un quatuor à cordes (le Kronos Quartet), et même des « fields recording » animaliers.
On pense en écoutant ce disque bien sûr à la Nouvelle Orléans, mais aussi à un hybride de Tom Waits et Screamin’ Jay Hawkins, aux « Culs Trempés » croisés dans le film « O’Brothers », au Rhythm’n’Blues des années 60, et à toute l’étendue des composantes absorbées par la musique afro-américaine, y compris les rythmes latins et caribéens.
Le résultat, loin de ressembler à une quelconque accumulation hétéroclite qui s’écroulerait en ouvrant la porte du placard, est d’une grande cohérence, dont le fil conducteur est tricoté par la voix rocailleuse à souhait et l’harmonica diatonique de Wade Schuman, entouré d’un septet cuivré au petit poil : bref, du blues, mais dépoussiéré à grands coups de torchons !
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